JEAN-CHARLES GUICHEN

 

Jean-Charles Guichen

Breizh an Ankou

Qu’on ne s’y méprenne pas, le nouvel album de Jean-Charles Guichen évoque une Bretagne « bien vivante », en dépit de la référence à l’Ankou (personnage mythologique qui représente la mort) !
L’origine de l’expression vient en fait de son « solo de l’Ankou » (ou « solo de la mort ! »), un projet artistique développé dans les fest noz.

 JC Guichen

 

Si la pulse et les rythmes de danse conservent ici un rôle déterminant, la guitare se retrouve de fait au cœur de l’orchestration des thèmes. Dans cet album à la fois très lyrique (par ses mélodies) et très dansant, le talent de Jean-Charles s’illustre avec brio. « Je suis réputé comme guitariste rythmique », déclare-t-il. D’où le recours à une technique « un peu hybride, entre la mélodie, la rythmique, autour du médiator, de l’arpège… », conjuguée avec une orchestration « symphonique » de la guitare, l’orchestre proprement dit (notamment la rythmique basse/batterie) devenant lui-même une extension de son instrument, un reflet de « l’âme de la guitare ».


Soïg et Dan


Dans son cheminement sur l’instrument (amorcé en 1976), la découverte du DADGAD lors d’un stage avec Soïg Sibéril (en 1986) a constitué une étape importante pour Jean-Charles. « C’est grâce à cet accordage-là que je me suis senti à l’aise en fait, explique-t-il. C’est un accordage qui rentre dans le spectre de la musique celtique, je trouve. Ça correspondait totalement à ma volonté. (…) Il y a des accords de base, mais chacun doit trouver sa technique personnelle. » C’est en travaillant sur ces accords ouverts (spécialement le DADGAD) que Jean-Charles a développé sa veine de compositeur. Autre figure très importante pour lui dans l’univers de la six-cordes, celle de Dan Ar Braz. « C’est Dan qui m’a donné envie de faire de la guitare au départ, avoue-t-il. Je suis très fier de l’avoir à mes côtés sur l’album, et qu’il ait accepté de travailler sur une de mes compositions… Je crois que j’ai visé juste ! »


Un rêve de gosse


« Ce que je sais faire de mieux, c’est faire danser les gens », reprend le guitariste, dont le jeu calque souvent celui des pas des danseurs. « Ça m’arrive d’être seul sur scène devant 8000 danseurs, et ça me fait souvent penser à des vagues. On a l’impression d’être devant une mer qui avance, qui recule… C’est cet esprit-là que je voulais amener. » « J’ai appris à danser sur un banc !, explique-t-il. On se mettait dans une vieille salle avec un plancher qui était un peu « rebondissant ». Et le banc était un peu élastique… J’ai appris à danser le plinn comme ça malgré moi ! » (rires). Cela rejoint d’ailleurs l’origine de cette danse, née il y a longtemps pour « tasser la terre dans les maisons. » La trouvaille consistant à ouvrir l’album avec un Bagad, en proposant un alliage sonore inédit à la guitare acoustique, prend donc ici tout son sens. « Un rêve de gosse », précise l’intéressé.


Les cornemuses et les bourdons


Dans l’intro de ce même morceau (requérant un accordage en Ré-Sol-Ré-Sol-La-Ré), « j’ai déjà les bourdons de la cornemuse en fait, commente Jean-Charles, en joignant le geste à la parole. Tout est là, les cornemuses arrivent, et on est parti sur la danse (démonstration)… Ça se marie vraiment bien avec justement le côté « open tuning ». A l’origine, l’open tuning a été utilisé pour se rapprocher des cornemuses et des bourdons, donc on a vraiment l’alliage des deux ! » De quoi faire reluire son « tracteur », pour évoquer non sans humour la guitare « tout-terrain » qu’il utilise depuis une quinzaine d’années, une Martin J40 « de base ». « C’est une guitare qui sonne terrible… Et je me sens bien là-dessus. Je suis un martiniste ! », déclare-t-il. Si le talent des invités (Dan Ar Braz à la guitare, Sylvain Barou à la flûte et à la cornemuse irlandaise (uilleann pipe), Claire Mocquard au violon, Denez Prigent au chant…) sert incontestablement la veine mélodique du leader, ce dernier reste bien accroché à sa six-cordes, qu’il laisse s’exprimer a capella sur E Kemper (« De Quimper »), un hommage à sa ville natale.

« La musique bretonne pour moi se marie bien avec le rock’n’roll », lance notre guitariste, en guise de profession de foi. Un chemin ouvert bien sûr par le grand Alan Stivell, à qui les artistes bretons d’aujourd’hui doivent tous quelque chose. Un geste que Jean-Charles Guichen, en tout cas, revivifie à sa manière, pleinement incarnée par son expression guitaristique.


Concert le 24 mai sur l’esplanade de la Tour Montparnasse / Paris. Tournée Solo de l’Ankou : Perros Guirec (22) le 2/06, St-Mayeux (22) le 7/07, Benodet (29) le 14/7, Quimper (29) le 26/7, Festival des Hortensias/Perros Guirec (22) le 28/07, Lannion (22) le 17/08, Sucé-sur-Erdre (44) le 1er/09, Quimper (29) le 22/09, Perros Guirec (22) le 4/11. A suivre…


 

Album Guichen

Site : www.jcguichen.com

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